Libre
Bal de Noël
Bien vite Carlisle s’interposa lui aussi, retenant Vladimir en essayant de le raisonner. Je sentis également Jasper à mes côtés, et j’osai espérer que les deux sages de la maison mettront un terme à cette folie. Pourtant je tombai des nues lorsque Carlisle nous fit comprendre que la décision nous revenait, que c’était à nous seuls de décider du sort de tous nos proches ce soir. Ma bouche s’entrouvrit de surprise et je sentis mon bouclier flancher puis se rétracter violemment, laissant tout le monde à la merci des terribles pouvoirs de nos ennemis. C’est le prénom d’Alec que nous entendîmes tous, soufflé par une petite voix derrière nous. Je ne me permis pas de me retourner, ne voulant pas lâcher des yeux la scène qui se passait devant moi, mais il était évident que la jeune fille et le garde Volturi n’étaient pas de simples amis. Et au vu du regard de Caius et de Jane, ni l’un ni l’autre n’avaient l’air d’être au courant. Une humaine. Kate, sortie de nulle part, interrompit mes pensées en se ruant droit sur Caïus. Je retins mon souffle et poussai de nouveau la protection invisible hors de ma tête, juste à temps avant qu’elle ne puisse tenter quoi que ce soit contre le roi autoproclamé. Une seconde plus tard, Alec quittait son poste pour s’évanouir loin de la foule avec la petite innocente. Jane fondit presque immédiatement sur Jasper avant que nous ne puissions réagir. J’eus un mouvement vers eux tandis qu’ils disparaissaient, et hésitai. Je voulais à tout prix protéger Jasper de Jane, mais il restait Alec dans les parages, et dieu savait quels autres dons possédaient les gardes Volturi restants. Je me mordis la lèvre, ne sachant comment agir. Caius répondit sèchement à Kate, s’imposant devant nous tandis qu’Edward et Alice se rapprochaient de lui. Mon mari me faisait face, et je pouvais voir un léger sourire sur son visage, auquel je ne pus répondre que par un regard anxieux. La menace de Caius avait de quoi faire frémir. En une seconde, en sondant le regard d’Edward, je compris avec effroi que lui et Alice ne nous rejoindraient pas si un combat devait s’ensuivre. Carlisle disparut d’un coup, lancé sur les traces de Jasper. J’en fus légèrement soulagée : à deux ils auraient l’avantage sur Jane. Les deux armes principales de Caius étaient parties, et nos rangs se resserraient, notamment avec l’arrivée de Garrett, Eleazar et Carmen, le rebelle prêt à en découdre lui aussi, et le couple d’espagnols plus enclin à apaiser la situation. Esmé avait rejoint Carmen et je ne pus m’empêcher de jeter un œil inquiet à ma belle-mère. Nous ne pouvions pas lui infliger le supplice d’engager le combat contre les Volturi. Pas tant qu’Edward et Alice risquaient gros à rester dans leurs rangs. Je m’efforçai donc d’adopter une position moins agressive, résignée. Carmen avait raison, j’acquiesçai à ses dires, mon regard doré alternant entre Caius et Edward. Je ne pus cependant m’empêcher jeter un regard outré à Kate lorsqu’elle dit à Garrett qu’ils n’avaient plus rien à faire ici, elle qui avait eu la chance de récupérer son mari sans avoir eu à subir la torture de le voir aux ordres de Caius. J’étais consciente que ma réaction était déraisonnable, et dans le fond j’aurais préféré que tous les membres de notre famille soient loin de cette effroyable scène dont l’issue ne se présentait pas sous les meilleurs auspices. Je brûlais d’envie de tendre le bras pour pouvoir toucher mon mari, passer un peu de temps avec lui comme Caius nous le proposait en échange de notre abdication. C’est une odeur nouvellement arrivée qui me fit tourner la tête. Aro. Jamais je n’aurais cru que le voir serait pour moi synonyme de soulagement. Mais au vu de la situation, il ne pouvait en tout cas pas envenimer les choses pour nous. Quelque chose me disait qu’il devait éprouver un peu d’amertume envers celui qui était jadis son frère. Mais comment se faisait-il qu’il soit arrivé jusqu’ici ? Je jetai un coup d’œil interrogateur à Eleazar, dernier arrivé avant lui, et qui n’était pas entré dans la salle en compagnie de Carmen… Mais je ne fis rien d'autre que garder le silence.

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Le regard de Garrett me rassura un court instant, tout comme l’arrivée d’Aro. Mais Caius était bien trop déterminé à sortir de ce combat gagnant. C’est avec une amère ironie qu’il accueillit les propos de l’ancien roi, y répondant non sans cracher une fois de plus son venin. Puis il commit l’irréparable. Je le vis refermer ses bras autour du cou de mon mari, son visage déformé en un rictus assoiffé de sang et de vengeance. Mon bouclier explosa en mille morceaux tandis que mes yeux s’écarquillaient d’effroi, tout comme ma bouche qui s’ouvrit pour laisser passer un cri qui ne vint jamais. Le temps sembla ralentir, s’étirer comme pour mieux m’offrir cette vision qui glaçait tout mon être. Je ne saisis même pas les mots que Caius prononça par la suite, les yeux figés sur Edward, dont le premier réflexe avait été de se concentrer sur moi. Un craquement épouvantable résonna dans la pièce, et je pus vois une fissure se frayer un chemin le long du cou de mon mari, jusqu’à son menton. Ce n’est que lorsque Caius recula, et que deux nouveaux gardes immobilisèrent davantage Edward, que je me mis en mouvement. J’oubliai les humains, les menaces, les risques. Tout ce que je voulais, c’était arracher ces bras qui étranglaient Edward. « CAIUS, NON ! » hurlai-je à en faire trembler les murs, d’une intonation que je ne me connaissais pas. J’avais à peine fait un pas que deux bras immenses immobilisaient déjà les miens, me tirant à mon tour en arrière. Félix, sorti de nulle part, me dépassant de trois têtes, resserrait sa prise autour de moi. Une sorte d'instinct me fit réaliser que la distance qui nous séparait ne me permettrait pas d’attaquer avant que Caius ne tue Edward. Alors mon corps tout entier se mit à trembler, et je m’en remis à Félix pour me maintenir debout. Je n’avais toujours pas quitté mon mari des yeux, incapable de me détacher de son visage. Je me sentais mourir à l’avance ; mon univers tout entier implosait, mon cœur muet brûlait. La panique me clouait sur place, me rendant incapable de réfléchir. Je ne pouvais qu’observer les moindres détails de son visage, comme si c’était la dernière fois que je le voyais. Je ne repris conscience de ce qui se disait autour de nous que lorsqu’il prit la parole, pour répondre à Caius. Ses mots manquèrent de me faire mourir pour de bon, et je m’entendis murmurer « Tais-toi, je t’en prie, tais-toi, tais-toi… » à son intention, à je ne sais combien de reprises, jusqu’à ce qu’un nouveau craquement déchire le silence de mort qui régnait dans la salle. Un sanglot me secoua comme un spasme fulgurant, et mes réflexes tendirent mes muscles comme pour tenter de me sortir du carcan des bras de Félix, mais je n’en fis rien. « Caius, relâche-le. Nous partirons. Je t’en supplie. » finis-je par lâcher, vaincue, donnant au roi solitaire exactement ce qu’il voulait. Notre crainte, notre respect, notre reddition. Mais peu m’importait. Je ne voulais qu’une seule chose, garder Edward en vie. Et j’étais prête à neutraliser quiconque de notre clan tentant le moindre geste. Je n’avais toujours pas quitté Edward des yeux, haletante et tremblante de la tête aux pieds. Je ne le lâcherais pas des yeux jusqu’à ce que je doive quitter cette maudite salle.

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